conte rendu célèbre par Charles Perrault (1628-1703), le Petit Chaperon rouge, qui à l'origine était tout sauf un conte pour enfants, et d'ailleurs son héroïne moins naïve qu'il n'y parait.
Le Petit Chaperon rouge apparait officiellement pour la première fois en 1695 dans les Contes de ma mère l'Oye de Charles Perrault, mais tout comme les frères Grimm, après lui, ce dernier avait récolté de nombreuses traditions orales, d'origines rurales, qui circulaient alors en France, et qui étaient parfois plus ou moins modifiées en fonction du public par les nourrices, chargées de l'éducation des enfants de l'aristocratie et de la bourgeoisie, qui les sortirent du monde rural.
Il n'est donc pas évident dans le cas du Petit chaperon rouge de trouver l'origine exacte de la tradition en question. Certains, parmi lesquels, le psychanalyste, et pédagogue américain d'origine autrichienne, Bruno Bettelheim (1903-1990), voyaient dans un récit en vers latin d'Egbert de Liège (né vers 972), diacre, écolâtre de l'école épiscopale de Liège sous l'évêché de Notger (972-1008), datant de 1023, De puella a lupellis servata (la petite fille épargnée par les loups), dans son ouvrage Fecunda ratis (le navire rempli), un ancêtre du possible du conte, à travers certains traits caractéristiques du récit (soulignés) :« Une petite fille portant une tunique de laine rouge que lui a donnée son parrain est enlevée par un loup alors qu'elle se promène, insouciante du danger ; il l'emmène dans son antre pour que ses petits la dévorent. Mais les louveteaux, devant l'air décidé de la fillette, oublient leur sauvagerie, veulent jouer avec elle et lui caressent la tête. « Ô vous souris, dit-elle, ne déchirez pas la robe que m'a donnée mon parrain ».
Mais aujourd'hui, cette hypothèse est fortement contestée par la majorité des experts, suite aux travaux du folkloriste français Paul Delarue (1889-1956) et de l'historien français Jacques Berlioz (né en 1953). Ce conte servant à l'édification religieuse des ouailles de l'évêché de Liège, - tel que le montre notamment le fait que l'enfant porte une tunique rouge, vêtement lié au baptême, la protégeant de toutes violences - ne connut qu'une très faible diffusion, rendant difficile sa paternité pour le conte.Une autre piste possible se trouve en Asie, et en particulier deux contes populaires chinois, dont on a retrouvé des traces anciennes, La vieille femme tigre et La Grand-mère et le loup, qui ont tous les deux le même schéma, proche du conte que nous connaissons : le personnage central est toujours la grand-mère, à qui dans le premier deux fillettes apportent de la nourriture, et dans le second, c'est elle qui apporte à ses trois petites filles, seules à la maison, un panier de galettes et boulettes fourrées à la viande. Dans les deux cas, elle dévorée par un animal, dans le premier, un tigre, et dans le second, un loup qu'elle a rencontré en route. Cet animal, dans les deux cas, se fait passer pour la grand-mère afin de dévorer ses petits enfants, mais il finit victime de la ruse de ces derniers. Dans les deux cas, le conte montre une certaine méfiance envers le pouvoir, dont le tigre et le loup était le symbole, qui pouvait se livrer à des exactions. Donc sous une forme humoristique, les Chinois avaient fait de leurs contes oraux une sorte de contre-pouvoir probablement en des temps de crises du pouvoir qui furent dans l'Empire du Milieu assez régulières.Mais rien n'empêche de penser que les récits édifiants, tel celui d'Egbert de Liège, et les contes asiatiques se soient trouvés réunis peut-être entre le XIIe et le XIIIe siècle, car comme le montre les fables d'Ésope, l'inspiration littéraire venait pour ces contes animaliers et édifiants d'Orient et en particulier de la fameuse route de la soie qui dura jusqu'au XVIe siècle, à un moment où, à partir du XIIe siècle, d'après Catherine Velay-Vallantin, maître de conférence à l'EHESS et auteur d'une Histoire des contes, en repèrent en Occident. En effet, « Les prédicateurs franciscains et dominicains les utilisaient notamment pour illustrer leurs prêches. »
Mais le rassemblement des contes édifiants des moines et des contes asiatiques dans la tradition orale ne s'est probablement produit qu'entre le XIVe siècle et le XVIe siècle et s'est diffusé depuis le Nord de l'Italie, à travers le Tyrol italien, les Alpes italiennes et françaises et le bassin de la Loire probablement par le biais des marchands et des colporteurs.Mais il n'est pas évident de retrouver le récit original, car le conte s'est transmit oralement pendant des générations avant que Perrault ne le mette par écrit en 1695, entraînant des transformations, et plusieurs variantes ont donc été retrouvées selon les régions. Et c'est seulement, à la fin du XIXe siècle et jusqu'au milieu du XXe siècle, que des éthnologues et des folkloristes ont recherché dans les campagnes françaises les contes populaires courants, parmi lesquels le petit chaperon rouge. Cependant, il faut tenir compte que la version de Perrault, datant de 1695, a pu les influencer, même si on peut retrouver des traces du récit original dans son équivalent italien, la Finta Nonna (La fausse Grand-mère). C'est ainsi que sur une trentaine de versions, le folkloriste français, Paul Delarue (1886-1956), dans son Catalogue raisonné du conte français (1951), n'en retrouve que vingt qui viendrait directement de la tradition orale.
En effet, les traits communs permettent une reconstitution du conte original, empreint de son contexte historique image de la vie difficile à la fin du Moyen - Âge et à la Renaissance.